Jurisprudence du cabinet : Tribunal administratif de Rennes, Ordonnance, 12 avril 2023, n°2301611
Les élus d’opposition ont le droit de bénéficier d’un espace d’expression dans le bulletin municipal de la commune. Cet espace d’expression doit être suffisant et équitable sauf à porter atteinte au droit d’expression des élus d’opposition.
Par ordonnance n°2301611 du 12 avril 2023, le Juge des référés du Tribunal administratif de Rennes a ordonné la suspension de la délibération du conseil municipal de la commune de La Bouëxière en raison de l’existence d’un doute sérieux quant à l’illégalité de l’atteinte portée au droit d’expression des élus d’opposition consacré par l’article L. 2121-27-1 du code général des collectivités territoriales.
I. Le droit d’expression des élus d’opposition :
L’article L. 2121-27-1 du code général des collectivités territoriales prévoit que dans les communes de 1 000 habitants, les élus d’opposition sont titulaires d’un droit d’expression dans les publications d’informations générales sur les réalisations et sur la gestion du conseil municipal diffusées par la commune, tel le bulletin municipal.
Les modalités d’application du droit d’expression des élus d’opposition sont définies par le règlement intérieur du conseil municipal sous le contrôle du juge administratif [1].
Concrètement, tout élu d’opposition a droit à un espace d’expression, qu’il appartienne ou non à un groupe d’opposition. L’élu déclarant ne plus appartenir à la majorité municipale en cours de mandat, et devenant élu d’opposition, bénéficie également de ce droit.
L’espace réservé à l’expression des élus doit en outre être suffisant et être équitablement réparti [2].
II. La suspension en urgence des dispositions du règlement intérieur restreignant l’espace d’expression de l’élu d’opposition à 189 caractères :
Le Juge des référés du Tribunal administratif de Rennes était saisi de la question du caractère suffisant et équitablement réparti de l’espace d’expression défini par le règlement intérieur du conseil municipal de la commune de La Bouëxière.
Le règlement intérieur prévoyait que les élus d’opposition n’appartenant ni à la liste majoritaire, ni à la liste d’opposition, bénéficiait d’un droit d’expression individuel limité à 189 caractères dactylographiés dans la revue municipale de la commune.
Le Juge des référés du Tribunal administratif de Rennes a estimé qu’une telle limitation était manifestement insuffisante pour permettre à l’élu d’opposition d’exprimer un point de vue argumenté et construit sur les réalisations et la gestion de la municipalité par le conseil municipal.
Compte tenu de l’importance du droit d’expression des élus d’opposition et de l’insignifiance de l’espace d’expression défini par le conseil municipal, le Juge des référés du Tribunal administratif de Rennes a :
- Ordonné la suspension de la délibération adoptant les dispositions litigieuses du règlement intérieur dans l’attente du jugement à intervenir ;
- Enjoint au maire de la commune de La Bouëxière d’inscrire cette question à l’ordre du jour de la prochaine séance du conseil municipal ;
- Et enjoint que la modification du règlement intérieur s’applique dès la prochaine édition du bulletin municipal.
Si vous souhaitez être accompagné dans l’exercice de vos droits d’élu local, vous pouvez faire appel à mes services. Je vous conseille, vous assiste et vous représente devant votre collectivité ou devant le juge administratif dans la défense de vos droits.
[1] Conseil d’Etat, 28 janvier 2004, n°256544, Cne de Pertuis ; Conseil d’Etat, 14 avril 2022, n°448912, Cne de Thouaré-sur-Loire ; Conseil d’Etat, 14 avril 2022, n°451097, Cne de Willems
[2] Conseil d’Etat, 14 avril 2022, n°448912, Cne de Thouaré-sur-Loire, Conseil d’Etat, 14 avril 2022, n°451097, Cne de Willems
Crédit photographie : Image de Freepik sur Freepik